Bob Morane T094 Les Mangeurs d'âmes by Vernes Henri

Auteur:Vernes, Henri [Vernes, Henri]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Aventure
Éditeur: AlexandriZ
Publié: 1969-04-19T07:10:54+00:00

CHAPITRE VIII

Le morceau de quartz avait scintillé de mille feux quand le sorcier l’avait élevé dans la pauvre lumière du pétrole. Bob Morane comprit alors à quel abominable usage le Mangeur d’mes destinait ce fragment de cristal de roche. Il frémit. Presque aussitôt, il se reprit en pensant : « Non, ce n’est pas possible ! »

Au poing du houngan, la lame brillait et semblait avoir soudain pris vie. Et, tout à coup, l’homme hurla :

— Guédés[3], gardiens des félicités futures, ouvrez à cette enfant la porte de l’extase éternelle.

— Ay Bobo ! hurla la foule. Ay Bobo !

La lame du poignard était pointée vers le bas, en direction de la jeune poitrine offerte. L’inconnue, allongée, les yeux grands ouverts, ne semblait s’apercevoir de rien. On eût dit que, malgré elle, tout son être s’offrait en holocauste.

Morane eût voulu retenir les paroles qui échappèrent à Nathalie quand le houngan frappa.

— Non, pas ça !… Pas ça !

L’officiant suspendit son geste et tous les visages se tournèrent dans la direction d’où venait le cri.

— Pourquoi avoir marché dans ce cinéma ? gronda Bill à l’adresse de Nathalie.

— Ce n’était pas du cinéma, gémit la jeune fille. J’ai revu ma tante, et ce monstre qui lui plongeait son poignard en plein cœur, le sang qui giclait…

Soudain déchaîné, le houngan agitait les bras frénétiquement, hurlant à l’adresse des assistants :

— Attrapez-les ! Attrapez-les ! Ils doivent être sacrifiés aux guédés, sinon les portes des Enfers s’ouvriront devant nous.

Une cinquantaine de visages hagards, aux yeux écarquillés, s’étaient tournés dans la direction de l’endroit où Bob, Nathalie et Bill se dissimulaient. Des visages d’hommes et de femmes hallucinés, drogués, hors d’état de mesurer leurs actes, des hommes et des femmes fanatisés, animés par un seul instinct, celui du meurtre.

Et, brusquement, cette masse humaine roula en direction de Morane et de ses compagnons.

— On file ! hurla Bob. Vite !…

Il pointa le canon de son .38 vers la lampe à pétrole et fit feu à deux reprises. La lampe vola en éclats et l’obscurité se fit. Les deux amis et la jeune fille se propulsèrent en direction de la porte. Morane sentit que la main de Nathalie saisissait la sienne et il en fut heureux. Il ne voulait pas risquer de perdre la jeune fille en route, de la voir tomber entre les mains de cette foule hurlante lancée après eux.

En même temps, Bob et Nathalie atteignirent la porte. Derrière lui, Morane entendait le pas lourd de Ballantine, puis une série de coups puissants indiquant que son ami frappait à l’aveuglette sur leurs poursuivants.

— Laisse tomber, Bill ! hurla Morane. On n’est pas ici pour jouer les gros bras. Plus vite on courra, mieux cela vaudra !

Un puissant ricanement, lancé par Bill, éclata.

— Soyez sans crainte, cria le géant. Le temps de massacrer une demi-douzaine de ces cinglés et je vous rejoins !

Continuant à courir, Morane et Nathalie avaient jailli au-dehors. À cinq mètres devant eux, une silhouette se dressa. « La sentinelle ! » pensa Bob.

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